Un désir de liberté: Éléments
Galerie d’Art Ève Fontaine 1200 Girouard Ouest St-Hyacinthe, Qc. J2S 2Z1
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Du 25 avril au 16 mai 2010
Dans la peinture de Micheline Landry, la couleur est accompagnée en contrepoint par une fine expression calligraphique. Il y a chez cette artiste une force et une volonté de représenter, mais en même temps l’on découvre une grande ouverture, un sentiment de vulnérabilité. En quelque sorte, il s’agit d’une peinture existentielle qui traduit d’une manière épurée les joies et les incertitudes de la vie quotidienne. La couleur étalée sur un panneau en bois est secondée par un réseau de lignes tracées au bâton de graphite…
Les couleurs de la forêt nordique sont ramenées à une expression presque abstraite ou informelle – à une modulation de nuances parfois segmentée, autrefois tachiste. L’artiste évoque des atmosphères éphémères, improbables, qui ont le don de s’inscrire de manière durable dans notre mémoire. Micheline Landry atteint ses effets émotionnels grâce à un procédé pictural complexe, mais résistant à une analyse trop hâtive.
Un subtil post-modernisme
L’artiste réussit à combiner divers éléments de la pratique picturale post-moderne – à en formuler une certaine synthèse. C’est le dynamisme de la démarche picturale qui réalise la synthèse. La vision esthétique est empreinte de dynamisme et l’acte de peindre est spontané. L’aspect planifié de l’œuvre et le geste se complémentent. La diversité thématique des éléments dans l’image est résolue grâce à l’élan de peindre – à travers cette impulsion.
À l’intérieur d’un tableau, des visions éclatées reliées à un certain paysage sont réunies grâce à des champs de couleur qui traversent de manière harmonieuse l’espace plastique. L’artiste vise à atteindre un état d’harmonie entre les éléments de l’image. Même si elle ne l’atteint pas, elle semble inviter le spectateur de la suivre dans sa quête. La ligne calligraphique « danse » parfois autour d’une profusion de taches colorées, ou peut-être dans un coin du champ pictural. Micheline Landry sait éviter par tempérament les fausses notes, les dérapages esthétiques. L’image picturale, constituée d’éléments divers et visiblement décentrés, est rendue cohérente par un sentiment général d’harmonie qui ordonne les éléments du tableau.
Le bois et le vide
En tant que support pour ses images, l’artiste choisit des panneaux en contreplaqué de pin ou de merisier. À la base de la création, elle place son dialogue avec le support pictural.
« J’ai en effet une surface : il se présente devant moi des millions de possibilités. Par la suite, bien sûr, j’ai besoin d’explorer le potentiel de la couleur, la géométrie de l’espace… », remarque l’artiste.
Le jeu est donc entamé. Au départ, elle s’inspire du grain, du motif des marbrures et des cernes qui sillonnent le contreplaqué. La stratégie du travail pictural est presque déterminée par la structure du bois. Dans le cadre de cette dialectique qui définit l’œuvre de Micheline Landry, la rigidité de la surface en bois contraste avec le velouté des champs de couleur. Douceur et rigidité, plan et concept, épanouissement gestuel… autant de qualités contrastantes qui construisent l’image.
Le mot « dépouillement » revient constamment dans le discours de l’artiste. Au départ, son attitude est celle de la simplicité, liée à l’incertitude existentielle. Le bois dépouillé est la base visuelle pour construire le tableau, mais la surface en bois constitue aussi un point de chute lorsque notre regard devient las des couleurs. C’est dans le tableau Murmures épiés que l’éloquence du bois est la plus manifeste.
Une quête quasi spirituelle
Modulée horizontalement ou déployée comme tache parfois aléatoire, la couleur a un rôle décisif dans la création d’un espace plastique rêveur et quelque peu mystérieux. Micheline Landry semble engagée dans une quête quasi spirituelle d’accords colorés. L’artiste joue aussi le registre des variations de format et des dimensions du tableau.
Dans Face à face, des effets ivoire et lactescents transitent à travers des bleus pénétrés de noir et bleus ciel, pour se jeter dans une tapisserie de couleurs qui s’écoulent dans des nuances automnales. La fulgurance reflète le sentiment personnel de la séquence des quatre saisons. Dans Espace des matières, la tache explose en continuités cinabre, carmin et purpuracées emmêlées d’accents noirs aux connotations existentielles menaçantes, contre un fond bleu cobalt.
Dans Temps versé, la calligraphie occupe la place d’honneur et ce fil Ariane à la fois englobant, mais aussi embrouillé – enchevêtré – pourrait représenter la quête esthétique et vitale à la fois fragile et tenace de l’artiste. Divisé en trois pans différents qui communiquent néanmoins de manière fluide (toujours cette fluidité chez Michelle Landry!), Ciel d’automne offre une vue en éclaté, analytique – ou déconstruite – d’un paysage d’automne, mais en fait il s’agit du substrat d’un paysage. En apparence abstraite, la peinture possède un sous texte figuratif ou représentationnel. Elle représente à la fois l’objet nature et l’émotion interne de l’artiste. C’est une peinture qui est à la fois analyse de l’objet, reflet de l’émotion et anatomie des phases de celle-ci.
Dans ces images, le paysage se manifeste à la fois comme présence colorée, comme trace qui résulte d’un processus d’effacement, comme rêve lié à cette trace et comme absence dans les vides très amples. Dans la réconciliation d’un instant de qualités apparemment contraires – couleurs modulées, calligraphie sinueuse, gracile – l’artiste évoque un état de passage instable, fugace, qu’elle arrive à fixer fermement dans la mémoire du spectateur. La force de la peinture de Micheline Landry reçoit une reconnaissance croissante : ainsi, des œuvres de l’artiste sont présentées à la Maison du Québec, dans le cadre des Jeux olympiques d’hiver à Vancouver en 2010.